Biotesting et innovation : un événement collaboratif au service de l’excellence
La 6e édition du Congrès Polepharma du Biotesting, les 4 et 5 juin à Évreux, vise à renforcer la visibilité du secteur, connecter besoins et ressources en biotesting, et favoriser de nouvelles collaborations dans la filière française. Réunissant plus de 180 décideurs et acteurs des biomédicaments, cet événement phare mettra l’accent sur les échanges d’expériences, les nouvelles technologies et la convivialité pour accélérer l’innovation thérapeutique, selon son président Stéphane Morisson, directeur du développement analytique et du contrôle qualité Drug Product au sein de la direction du développement pharmaceutique (CMC) de la R&D des Laboratoires Servier.
Comment vous présenter en quelques mots ?
Arrivé au sein du groupe Servier en mars 2018, j’ai d’abord dirigé le contrôle qualité du site industriel de Gidy, dans le Loiret, jusqu’en septembre 2021. J’ai ensuite pris les rênes du laboratoire de développement industriel, avant d’être nommé, en juillet 2023, directeur du développement analytique et du contrôle qualité Drug Product au sein de l’entité CMC et de la R&D de Servier. À ce poste, je supervise les laboratoires analytiques du développement pharmaceutique de Gidy et Orléans, dans un contexte de transformation stratégique de la R&D du groupe. Mon parcours dans l’industrie pharmaceutique est riche de 25 ans d’expérience. J’ai notamment passé huit années dans le développement analytique chez des leaders du secteur, notamment Ipsen et Novartis, puis douze années à des postes de direction du contrôle qualité auprès de CDMOs, comme Famar. Ce parcours m’a permis d’acquérir une expertise aussi bien sur les produits chimiques – formes solides et injectables – que biologiques. Mes diverses expériences dans le contrôle qualité, le développement analytique en recherche et développement m’offrent une vision globale des besoins analytiques sur toute la chaîne de valeur des biomédicaments.
Pourquoi avoir accepté de présider le prochain Congrès Polepharma du Biotesting ?
Adhérant et partenaire historique de Polepharma, le groupe Servier participe de manière régulière au Congrès Polepharma du Biotesting depuis sa création en 2020. Avec un pipeline constitué à 50% de biomédicaments potentiels et des investissements majeurs, comme l’unité BioS inaugurée à Gidy, nous nous inscrivons pleinement dans la dynamique de bioproduction de médicaments innovants pour les patients. La présidence de la prochaine édition marque une étape naturelle dans cet engagement. Depuis plusieurs années, Fabrice Cantais, Analytical Leader au sein de Servier, est un membre impliqué au sein du comité de programmation du congrès. En parallèle, Olivier Laureau, notre directeur général, a présidé le Congrès France Bioproduction coorganisé par Polepharma et Medicen en 2024, renforçant ainsi la visibilité de Servier sur la scène nationale. Membre fondateur de France BioLead, notre groupe vise à stimuler les collaborations entre acteurs industriels et académiques pour développer des procédés analytiques plus robustes et efficients. Cette démarche collaborative incarne une volonté d’avancer ensemble – laboratoires, CDMOs et académiques – pour encourager l’innovation thérapeutique destinée aux patients et renforcer les compétences de toute la filière.
Quelle est l’ambition de cette 6e édition ?
Le Congrès Polepharma du Biotesting poursuit son ambition d’attirer davantage d’acteurs de la filière, tout en mettant en lumière le rôle crucial du biotesting dans le développement d’une bioproduction d’excellence. Ce rendez-vous francophone unique, dédié au contrôle analytique, offre une plateforme d’échanges entre industriels et scientifiques pour partager nos initiatives et des solutions concrètes face aux défis actuels. Dans ce sens, le comité de programmation se réunit une fois par mois pour compléter et affiner le programme au plus près des attentes et besoins des acteurs du biotesting.
Parmi les thématiques clés en discussion pour l’édition à venir figure le testing thérapeutique au plus proche du patient, comme les tests d’autodiagnostics. C’est un sujet prospectif, qui reste à être confirmé. Les échanges porteront également sur des innovations en lien avec la production continue et le suivi analytique en temps réel (PAT). Ces approches visent à réduire les délais de libération des lots et à optimiser les procédés en ajustant et corrigeant les paramètres en ligne. L’accent sera également mis sur les méthodes alternatives biologiques et les méthodes analytiques rapides afin d’accélérer le développement des biomédicaments, en s’appuyant sur l’automatisation, pour maitriser les coûts élevés associés à ces technologies complexes nécessitant des équipements de pointe. Un enjeu actuel est d’adapter le biotesting au bon niveau de qualité demandée par la réglementation. Les enjeux réglementaires seront ainsi un autre sujet important et structurant lors de l’événement.
Dans l’ensemble, le congrès reste fidèle à son leitmotiv : favoriser le networking et les échanges pour renforcer la collaboration au sein de la filière.
Quelles thématiques vous semblent importantes ?
Le programme des deux journées, qui est encore en cours de finalisation, promet d’être captivant, car conçu à partir des besoins et expériences du secteur. Entre conférences, tables rondes, ateliers techniques et networking, chaque moment sera une occasion d’apprendre et de collaborer. Retours d’expérience, nouvelles technologies et défis de la filière seront au cœur des discussions, réunissant laboratoires, fournisseurs, start-up et acteurs académiques pour imaginer ensemble les solutions de demain.
Chez Servier, le biotesting est bien plus qu’un outil de contrôle analytique : il est une composante essentielle d’une approche centrée sur le patient. Intégré à chaque étape du développement des biomédicaments, le biotesting joue un rôle clé, depuis l’identification et la confirmation de la structure du candidat médicament, jusqu’à la garantie de conformité réglementaire du produit final.
Notre objectif ? Accélérer les étapes pour mettre rapidement des solutions thérapeutiques innovantes à disposition des patients. La production continue et les technologies de suivi analytique en temps réel (Process Analytical Technology – PAT) apparaissent comme des leviers stratégiques pour y parvenir.
En parallèle, notre laboratoire s’engage à réduire l’impact environnemental des développements grâce à des méthodes de biotesting innovantes. Celles-ci peuvent permettre de limiter l’utilisation de solvants et favorisent des technologies plus respectueuses de l’environnement, un enjeu prioritaire dès les phases de recherche.
Avec cette double ambition – répondre aux besoins des patients et adopter des pratiques durables – le groupe Servier sera présent en force au Congrès Polepharma du Biotesting pour apporter son témoignage sur comment placer l’innovation au centre de ces actions.
Sur quel sujet intervient Servier et pourquoi ?
Nous avons l’habitude d’intervenir une année sur deux lors du Congrès Polepharma du Biotesting pour mettre en avant nos nouvelles technologies et manières de travailler. L’année dernière, le groupe a présenté une avancée majeure : le remplacement de la méthode Elisa par une technologie nano fluidique développée par Gyros, offrant des résultats plus rapides et fiables, tout en réduisant les risques d’erreurs humaines grâce à l’automatisation. En complément, cette année, nous avons intégré un automate de préparation des échantillons pour diminuer les gestes répétitifs et limiter les erreurs de manipulation, permettant aux techniciens de se consacrer à des tâches à plus forte valeur ajoutée.
Pour l’édition à venir, Servier pourrait mettre en lumière le projet collaboratif Climbin. Ce projet, mené avec des partenaires publics et privés, explore l’utilisation des sondes Raman pour le suivi analytique en ligne dans la bioproduction. Développées en partenariat avec Indatech, fournisseur de solutions spectroscopiques, Ondalis, pour les aspects de chimiométrie, et le Professeur Igor Chourpa qui dirige l’unité de recherche sur les Nanomédicaments et Nanosondes de l’université François-Rabelais de Tours, ces sondes sont testées au Bio3 Institute en vue d’une future implémentation au sein de l’unité BioS. Adaptées à l’environnement biologique, elles permettent d’analyser en continu un certain nombre d’attributs qualité directement depuis les bioréacteurs, accélérant ainsi les processus du biotesting et renforçant leur efficacité.
Le groupe Servier, et plus globalement l’industrie pharmaceutique, mise sur des solutions simplifiées et facilement implantables au niveau du contrôle qualité pour innover dans un secteur complexe nécessitant des équipements de pointe. Nous avons également besoin d’avoir des compétences qualifiées pour nous accompagner dans nos développements.
Nous sommes toujours à l’affût de nouvelles opportunités, nouveautés et innovations dans la filière, à tester et à s’approprier pour progresser en continu.
Quelle est l’actualité de Servier concernant le biotesting ?
L’actualité de Servier est marquée par l’inauguration de l’unité BioS à Gidy, qui combine la production de la drug substance avec le remplissage aseptique de vials et de seringues sur un même site. Cette configuration innovante vise à réduire les délais de mise à disposition des médicaments pour les patients. La certification par l’ANSM est attendue courant 2025, après les premiers lots d’essai déjà réalisés avec le soutien essentiel du biotesting.
En parallèle, le groupe s’appuie également sur l’expertise de Symphogen, son centre d’excellence danois acquis en 2020. Spécialisé dans le développement d’anticorps monoclonaux, bi- et tri-spécifiques, celui-ci conçoit des méthodes analytiques à partir d’équipements de pointe. Ces méthodes sont ensuite transférées et adaptées au sein de BioS pour garantir leur adéquation avec les produits.
L’enjeu majeur pour 2025 est donc de démontrer la capacité de BioS à produire des lots cliniques en toute sécurité et en conformité avec les normes réglementaires. Le biotesting, pierre angulaire de ce processus, assure la qualité et la sécurité des produits à chaque étape.
Quels axes d’innovation vous semblent les plus prometteurs aujourd’hui ?
Chez Servier, l’innovation en biotesting se concentre sur l’élaboration de méthodes analytiques plus rapides et alternatives. L’objectif est de développer des méthodes «plateformes d’analyse », validées pour être appliquées à un maximum de biomédicaments du groupe. Cela permettra d’accélérer les processus tout en garantissant une fiabilité maximale, afin de favoriser l’innovation rapide de nouveaux médicaments.
Un autre axe clé est le testing en lien avec la production en continu, avec l’implémentation d’analytique directement dans les bioréacteurs, utilisant des technologies comme les sondes Raman. Cela nécessite des compétences accrues en analyse de données en temps réel.
L’intelligence artificielle (IA) représente également une promesse majeure pour le biotesting, de même que le développement de nouvelles méthodes permettant de suivre simultanément plusieurs attributs qualité (méthode multi-CQA) et de réduire ainsi les délais et coûts de développement. Servier se prépare activement à ces évolutions, en collaborant avec des CDMOs, des industriels et des acteurs académiques pour tirer pleinement parti de ces technologies émergentes dans la biopharma.
Quels sont les défis à relever en priorité pour les laboratoires pharmaceutiques et leurs partenaires CDMOs fédérés au sein de Polepharma ?
La bioproduction pharmaceutique, en pleine expansion, soulève des enjeux majeurs.
Premier défi : répondre aux exigences réglementaires. Avec des médicaments issus du vivant, les autorités de santé imposent une vigilance accrue pour garantir leur qualité. L’évolution du cadre légal vise à permettre l’innovation tout en rassurant les acteurs du secteur, instaurant un niveau d’exigence commun entre partenaires.
Deuxième défi : entretenir des relations solides avec les partenaires. Chez Servier, la collaboration avec les CDMOs repose sur la transparence et la confiance. Une vision globale et des attentes claires sont partagées pour garantir le succès des projets, nécessitant flexibilité et adaptation face aux évolutions.
Troisième défi : la nécessité d’avoir des compétences pointues. La bioproduction exige une combinaison d’expertises internes et externes pour superviser efficacement les prestations. Le secteur manque encore de profils spécialisés pour répondre aux besoins croissants.
Enfin, l’enjeu économique et financier est crucial. La fabrication et l’industrialisation des biomédicaments restent complexes. Un dialogue constant avec les autorités de santé, à l’échelle française, européenne et américaine, est indispensable pour ajuster les exigences en biotesting, sans compromettre la qualité. Dans un secteur en perpétuelle évolution, ces échanges durant le Congrès Polepharma du Biotesting permettront de poser les bases d’un développement durable et innovant.
Quels autres enjeux et tendances voulez-vous mettre en avant dans le secteur ?
Encore à ses débuts, la filière des biomédicaments montre des signes prometteurs de croissance, notamment grâce à l’émergence de start-up et de sociétés spécialisées, en particulier dans le biotesting. Ces nouveaux acteurs comblent des besoins que des groupes comme Servier ne peuvent couvrir seuls. La clé est maintenant de mutualiser les expertises. La collaboration entre entreprises privées et acteurs académiques est essentielle pour stimuler l’innovation thérapeutique et développer des procédés d’analyse plus performants.
Un défi majeur reste de recruter des experts. Dans un secteur en rapide évolution, anticiper les compétences de demain est crucial. Les partenariats avec des organismes de formation tels que le Groupe IMT (avec le Bio3), SupBiotech, ou l’ENSTBB, sont indispensables pour aligner les offres éducatives avec les besoins de l’industrie.
Enfin, l’IA est un levier d’avenir. Les nouvelles technologies, notamment l’intelligence artificielle, ouvrent des perspectives d’automatisation dans la production et le biotesting. Cela appelle à renforcer les compétences en analyse de données pour accompagner cette transformation technologique.
Avec ces enjeux, la filière des biomédicaments et du biotesting, qui sera réunie sur le Congrès Polepharma du Biotesting, posera les bases d’un écosystème alliant innovation, collaboration et excellence.
En quoi le Biotesting est-il stratégique à vos développements dans les cinq prochaines années ?
Le groupe Servier affirme son ambition de devenir un acteur incontournable de la bioproduction, en consolidant son expertise dans le biotesting, un pilier essentiel à toutes les étapes du développement des biomédicaments. Avec 85 millions d’euros injectés dans sa nouvelle unité BioS, Servier entend renforcer sa position sur ce marché porteur. Actuellement, 50% des projets de R&D du groupe concernent des produits biologiques, notamment dans l’oncologie, la neurologie et les maladies auto-immunes. L’oncologie, qui absorbe 20% du budget R&D, est au cœur de sa stratégie, avec l’objectif d’atteindre 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires d’ici 2030, dont 4 milliards dans l’oncologie et la neurologie. Les biomédicaments promettent des avancées majeures, notamment dans le traitement des maladies rares, des cancers, ou des maladies inflammatoires auto-immunes. Grâce à de nouvelles plateformes de bioproduction, Servier ambitionne de proposer des thérapies personnalisées et ciblées, apportant des solutions de rupture pour les patients. Le groupe s’appuie sur les biothérapies pour transformer le paysage des soins dans des domaines où les besoins restent importants, en misant sur l’innovation pour améliorer significativement la prise en charge des maladies complexes et rares.
Quelles sont les évolutions souhaitables à espérer ?
La filière bioproduction connaît une croissance notable avec l’émergence d’acteurs spécialisés notamment dans le biotesting, témoignant d’une tendance favorable sur le marché. La France, riche en atouts, s’affirme comme un terreau attractif pour les talents et les start-ups du secteur.
En 2025, le groupe Servier prévoit la certification de son unité BioS, ouvrant la voie à la production des premiers lots cliniques d’ici la fin de l’année. Ce jalon s’accompagne de perspectives prometteuses grâce à l’avènement de l’intelligence artificielle, de solutions plateformes et de méthodes innovantes accélérant le développement des biomédicaments.
L’unité BioS et l’extension des infrastructures R&D à Orléans et Gidy illustrent l’engagement de Servier à produire en France. Ces efforts visent à renforcer l’accès des patients français aux innovations thérapeutiques, tout en consolidant l’indépendance sanitaire nationale.
Avec ces initiatives, nous participons activement à la transformation de la bioproduction, combinant innovation et souveraineté industrielle.
Comment Polepharma pourra-t-il contribuer au succès des stratégies des entreprises ?
Pour Servier, l’innovation ne se construit pas seule. La collaboration entre acteurs de la filière est essentielle pour développer des solutions thérapeutiques de rupture, et des entités comme Polepharma jouent un rôle clé dans cette dynamique. Catalyseur d’échanges et de progrès, Polepharma favorise la mutualisation des expertises et le partage d’expériences, offrant un regard global sur la filière. Cet apport est précieux pour identifier les axes d’amélioration et définir les priorités des prochaines éditions du congrès. En tant qu’intermédiaire clé, le cluster facilite les interactions entre participants, renforçant l’innovation en biotesting pour accélérer l’accès des patients aux médicaments.
Par ailleurs, nous souhaitons aller au-delà du congrès, en organisant des événements ciblés via Polepharma. Ces journées à thème pourraient permettre de se pencher sur des problématiques spécifiques, comme les nouvelles normes réglementaires, les plateformes d’analyse ou les innovations en biotesting. L’objectif est de multiplier les temps forts tout au long de l’année pour maintenir un dialogue constant et avancer collectivement sur les enjeux de la filière. Une approche collaborative qui place l’innovation et l’efficacité au cœur des priorités !
Propos recueillis par Marion Baschet Vernet